Documentaire en gestation

Il est encore loin d’être sur nos écrans et pourtant il semble en valoir la peine : « Douce France » (titre hélas un peu galvaudé) est un film documentaire qui suit des lycéens de Seine-St-Denis dans leur enquête sur EuropaCity, parc de loisirs et de commerces qui projette de se construire sur d’importantes terres agricoles proches de chez eux. D’abord indifférents à l’avenir de ces terres, séduits par la promesse de divertissement et d’emplois, Amina, Sami, et Jennyfer se font progressivement leur propre avis.Au gré de leurs investigations, ils rencontrent promoteurs, élus, militants, paysans et commerçants. À l’aube de leur choix d’orientation, ils changent et agissent au cœur de leur territoire.

Les auteurs souhaitent faire de ce film un outil de sensibilisation et de débat pour, comme on dit, « retisser du lien social entre les quartiers, les villes et les campagnes et organiser des débats dans toutes les régions ». Un beau sujet en perspective.

Mais avant cela il faut réussir à boucler le financement du documentaire. Un financement participatif est lancé.
https://www.kisskissbankbank.com/fr/projects/
La vidéo de présentation : https://bit.ly/37qomtk



Beynac un jour, Beynac toujours ?

La presse locale se régale. Matt Damon, Ben Affleck et quelques autres – dont 800 figurants recrutés en Périgord – tournent en Sarladais sous la direction de Ridley Scott. La plus grosse production depuis la Jeanne d’Arc de Luc Besson (1999) à siéger au château de Beynac « actuellement fermé au public pour les besoins du film » écrit une journaliste de Sud-Ouest qui constate que le secret est de mise : « Il faut bien tendre l’oreille pour être informé… À Beynac, seules les personnes ayant un badge « Last Duel Crew » autour du cou sont autorisées à passer par les vigiles qui gardent les entrées ».


À défaut de pouvoir interroger l’équipe du film, « Sud Ouest » est allé voir ceux qui en profitent. Conclusion générale : en cette quasi-morte saison c’est « bon pour les affaires », que ce soit à l’hôtel Saint-Albert, à Sarlat, intégralement réservé pour loger des figurants, des doublures, des accessoiristes, des techniciens ; ou au Grand Hôtel ; ou en d’autres lieux secrets qui hébergent les vedettes.

Le dernier duel est inspiré d’un fait réel : Le 29 décembre 1386 eut lieu, à Paris, dans le champ clos du monastère de Saint-Martin, le dernier duel judiciaire, également appelé « jugement de Dieu ». A l’issue d’un combat ritualisé mais sans merci, en présence du roi Charles VI, le chevalier Jean de Carrouges eut raison de l’écuyer Jacques Le Gris qu’il accusait d’avoir violé sa femme, Marguerite de Thibouville.

Jean de Carrouges au combat en Ecosse

Un scénario d’un féminisme éblouissant et d’une actualité imparable ! On attend Ridley Scott au tournage et au tournant. Après tout il est l’auteur des Duellistes (prix du jury à Cannes en 1977) et de Thelma et Louise (six nominations aux oscars en 1991).

À retenir :

Le réalisateur britannique occupe -très provisoirement – une forteresse dont les seigneurs n’eurent de cesse de combattre les Anglais au temps où ces derniers occupaient l’Aquitaine.

Une partie du chantier de la déviation de Beynac est, semble-t-il, utilisé comme site de délestage par la production du dernier duel. La construction de cette déviation, voulue envers et contre la justice administrative par le conseil départemental de la Dordogne est à l’arrêt (https://www.sudouest.fr/2019/12/10/contournement-de-beynac-24-le-departement-deboute-).

En attendant l’issue du dernier duel entre l’Etat et le Département…

Triste solo

Dans un mois moins un jour le premier tour des municipales. À ce stade on peut se permettre une incursion civique. Dans combien de communes, petites voire moyennes, l’électorat n’aura-t-il le choix qu’entre voter pour l’unique liste en piste ou s’abstenir (voter blanc ou nul étant une déclinaison de cette absence de choix réel) ? En tous cas je connais au moins un cas en Dordogne : avec 1700 habitants la loi fait obligation de présenter des listes complètes et paritaires de 19 noms …Et au bout du compte une seule liste sera soumise aux suffrages. Il ne s’est donc pas trouvé 19 autres citoyen.nes pour « y aller ».

Si l’on faisait de la sociologie de comptoir on s’interrogerait sur les raisons profondes de ce fiasco démocratique : désintérêt de la vie publique ? Manque de temps ? Peur de s’exposer – mais à quoi – ? À moins que le bilan de l’équipe sortante ne fasse l’objet d’un plébiscite citoyen à inscrire sur le champ au Grand Livre des Records ?

Et pourtant les sujets de mécontentement ne manquent pas : une place de village en chantier depuis des mois, des « urnes » pour collecter les ordures plantées en surplomb de ladite place

Quoi qu’il en soit les futures séances du conseil municipal seront, par la force des choses, réduites à un attristant entre-soi.

Après la date limite de dépôt des listes il sera intéressant de connaître le nombre de communes à liste unique, d’une part pour mesurer à l’échelle nationale le recul démocratique que ces solos matérialisent ; d’autre part pour ouvrir la réflexion à des pistes pour y remédier. Peut-être en relevant le seuil (1000 habitants actuellement) au-delà duquel les listes complètes sont obligatoires ? Et en restaurant le panachage, sport villageois par excellence…

Lubat libre !

Libertaire, gentiment provocateur, très pédagogue sous ses airs bourrus, et surtout épatant musicien de jazz, inventif et talentueux, tel est Bernard Lubat. On ne va pas refaire l’histoire d’Uzeste Musical, son festival dans son coin de Gascogne qu’il chante et fait chanter depuis… longtemps. Patrick Espagnet, journaliste génial, hélas disparu, écrivit les meilleures pages de la Lubat saga.

Il se trouve que Lubat était en fin de semaine dernière à Périgueux et Boulazac grâce au festival de jazz(s) Du Bleu en Hiver de Tulle (1). Des coraux finement dessinés illustrent le programme. On se sent ailleurs. Mers du Sud ? Juste le théâtre l’Odyssée, esplanade Badinter, Périgueux.

Bernard Lubat a d’abord placé sur scène douze « tambours oeuvriers », hommes et femmes amateurs avec lesquels le maestro avait travaillé le matin même un prélude tambour battant. Puis la compagnie Lubat de Jazzcogne dans un format de quatre batteurs percussionnistes, deux guitares et piano a pris la relève.

On a eu de mal à partir Lubat n’ayant pas envie de nous laisser en plan sans passer un message combattif. Du Bleu en Hiver prenait des airs de Mai en Janvier.

Après il fallait retrouver la bagnole sur l’esplanade. Il faisait humide. C’était pas gagné…

(1) http://www.dubleuenhiver.fr ; 05 55 22 15 22

Anne, une pianiste en hiver

L’hiver le Périgord redevient la Dordogne, un département comme un autre, dépourvu de l’opulence estivale dont jouissent les touristes et les vacanciers. Il fait froid, ou humide. Ou les deux. Les sorties culturelles se font rares, d’abord parce que l’offre est rare elle aussi.

Autant dire qu’un concert de la grande pianiste de renommée internationale Anne Queffélec à Périgueux c’est Noël en plein mois de janvier. Haydn, Mozart, Beethoven. Achever la soirée sur l’Ultime de Ludwig van c’est tellement beau qu’on se demande si on mérite tant de grâce et de talent.

L’association Sinfonia, pilier de la diffusion musicale en Dordogne (et en Périgord !) partage son activité entre baroque l’été – concerts méritoires dans de petites églises campagnardes – et grands interprètes classiques l’hiver : sept concerts entre octobre et mai. En février Sélim Mazari succèdera à Anne Queffélec. On est impatient.

Rodez, suite : enfin les femmes !

Lu dans la presse du jour :
Le musée Soulages réhabilite les artistes féminines
Une exposition pour réparer les injustices hommes/femmes : tel est l’objectif du musée Soulages à Rodez, avec « Femmes années 50 – Au fil de l’abstraction, peinture et sculpture ». Consacrée à la création abstraite des femmes dans les années 1950 à Paris, cette exposition est composée de 83 œuvres produites par 42 artistes féminines. A l’époque, ces dernières n’ont pas connu le succès espéré, car il était plus difficile pour une femme que pour un homme de faire reconnaître son talent. Certaines avaient même choisi de signer leurs œuvres avec un nom masculin. Cette exposition, visible jusqu’au 10 mai, est l’une des plus importantes du musée Soulages.

Quelle bonne nouvelle !

Le musée Soulages

L’art et la santé

Un vagabondage au-delà des frontières, pour la bonne cause :

Le bureau Europe de l’Organisation Mondiale de la Santé vient de publier une étude sur les effets bénéfiques de l’art sur la santé. Certains diront que cela tombe sous le sens. Mais c’est mieux si on peut le prouver. Les chercheurs de l’OMS ne se sont pas contentés d’effleurer la question. Ils font la synthèse des données mondiales sur le rôle des arts dans l’amélioration de la santé et du bien-être. Conclusion : « les résultats de plus de 3 000 études ont permis de conclure que les arts jouent un rôle important dans la prévention des problèmes de santé, la promotion de la santé, ainsi que dans la prise en charge et le traitement des maladies tout au long de la vie ».

http://www.euro.who.int/fr/publications/abstracts/what-is-the-evidence-on-the-role-of-the-arts-in-improving-health-and-well-being-a-scoping-review-2019

Cette étude tombe à pic pour me donner l’occasion de signaler une initiative de Parole et Réactions, association des patients et proches de l’institut de cardiologie de la Pitié Salpétrière, fondée par le Pr Gilles Montalescot. Depuis l’été dernier les patients peuvent bénéficier d’une visite gratuite (avec deux accompagnateurs) au musée de Compiègne sur présentation d’une ordonnance muséale. Il ne s’agit pas seulement de tourisme culturel – ce qui, en soit, serait très bien – mais de pouvoir mesurer les bénéfices physiques et psychologiques d’une visite au musée, parc inclus. Les patients remplissent un questionnaire avant et après la visite pour identifier les effets du parcours culturel.

Les médecins francophones du Québec ont, les premiers, il y a plus d’un an, lancé ce projet. Parole et Réactions s’en est inspiré.

Tanguy Queffélec, qui a pris part pour Parole et réactions à une table ronde du Ministère de la Culture sur le thème « le corps du visiteur dans les musées », a commenté ainsi l’ordonnance muséale : « je vois dans le lien, dans les relations de l’Hôpital et du Musée quelque chose qui pourrait s’apparenter à une fraternité, à établir, à instituer. Il existe entre ces deux institutions, l’Hôpital et le Musée, une complémentarité des missions et des ambitions : entre infirmiers et chirurgiens, le premier intervient sur le corps des individus, jusque dans les profondeurs de leur organisme ; l’autre, le Musée, à travers ses chefs d’oeuvre et ses successions d’atmosphères, s’adresse à l’esprit d’un visiteur, à son intimité intérieure, au mystère de ses capacités d’émotion…
Le corps et l’esprit, l’Hôpital et le Musée : voilà une rencontre difficile à contourner. »

Montaigne sédimentaire

On a tant écrit, glosé, publié sur Montaigne qu’on se demande souvent s’il est encore possible, nécessaire ou tout simplement agréable de prendre connaissances de nouvelles publications consacrées au Périgourdin, seul maire de Bordeaux à avoir renâclé à tenir la fonction.

La revue « Sédiments », sous-titrée « les grands cahiers Périgord Patrimoines » vient pourtant dans son numéro 10 intitulé « Montaigne et nous » (1) de réussir le pari d’aborder autrement l’auteur des Essais. Vingt-six personnalités – dont Jean-Pierre Chevènement, Christian Bobin, Jean-Claude Guillebaud, Pierre Bergounioux…- ont accepté le pari de « se raconter un peu au miroir de Montaigne ».

Le dessinateur Daniel Maja, illustrateur de livres pour la jeunesse, collaborateur de magazines réputés (le New Yorker…) accompagne les écrits.

C’est très réussi. Loin de vains exercices de style les textes sont très personnels, bien imprimés sur le très beau papier choisi par Sédiments depuis sa création en 2013 (le premier numéro était consacré à La Boétie, mais il y en eut aussi sur Doisneau, la forêt, les Beunes, ainsi qu’une anthologie de la préhistoire littéraire avec un génial texte de Cavanna ).

Pour mémoire, la citation de Flaubert en exergue de la revue :

« Lisez Montaigne. Lisez-le lentement, posément ! Il vous calmera. Et n’écoutez pas les gens qui parlent de son égoïsme. Vous l’aimerez, vous verrez. Mais ne le lisez pas comme les enfants lisent, pour vous amuser, ni comme les ambitieux lisent, pour vous instruire. Non, lisez pour vivre. »

(1) Montaigne et nous – Sédiments 10 – 20 €

http://www.perigord-patrimoines.com/publications

Ricochets en Nontronais

Nontron respire le Limousin et l’isolement, en haut de la Dordogne, sur un promontoire dominant le Bandiat. Ce petit cours d’eau recèle de jolis galets bien plats, objets à ricochets qu’un duo de designers invités en résidence a eu l’idée de transformer en couteaux de poche. Romain Diroux et Manon Leblanc exposent le fruit de leurs travaux jusqu’au 1er février 2020 au pôle expérimental des métiers d’art de Nontron et du Périgord-Limousin. L’exposition est logiquement intitulée Ricochet. Elle est logée dans le château, où est hébergé le pôle expérimental. Beaux parquets de chêne, vues superbes sur le bourg et la vallée, belles vitrines emplies de couteaux dressés comme des objets d’art. La médiatrice originaire d’Alsace est enthousiaste. Dans quelques mois les travaux en cours permettront d’accéder à de nouveaux espaces à l’étage.

À l’écart de presque tout Nontron défend son patrimoine avec la vigueur d’un village gaulois assiégé par le désert. On comprend que rien n’est simple – y compris la mise en place d’une signalétique correcte qui éviterait d’errer en vain -, mais même en hiver on s’accroche.

La coutellerie reconstruite en surplomb de la rivière offre un bel espace d’exposition-vente et une vue sur les ateliers.

l’atelier de la coutellerie

Bref, s’il fallait trancher, on dirait que la visite aiguise la curiosité. Bienvenue aux esprits affûtés !

Local, vous avez dit local ?

Aux pays des mille châteaux et de la préhistoire de haute volée le petit village d’Agonac en Périgord vert n’a guère d’atouts dans son jeu pour se distinguer. La place du bourg naguère ombragée de tilleuls est en ce moment un chantier boueux. L’eau, maligne, suivant sa pente naturelle, a profité des derniers déluges pour s’infiltrer dans la nouvelle école troglodyte, que ses promoteurs ont eu l’idée d’encastrer en semi sous-sol sous ladite place. Les habitants qui trainent péniblement leurs sacs poubelles dans les conteneurs creusés à proximité (le ramassage porte à porte a été supprimé) ont ainsi tout loisir de juger de l’état d’avancement des travaux…

Heureusement il y a de bonnes nouvelles : un enfant du pays, petit-fils des anciens épiciers de la place, a récemment eu les honneurs de la presse locale. Le journal Sud-Ouest rapporte que Philippe Mesuron, ancien candidat de l’émission Masterchef et désormais ambassadeur de l’association Foie gras du Périgord, s’est rendu à La Réunion
avec deux collègues. Il a partagé son savoir-faire en associant le canard à des mets locaux. Six apprentis cuisiniers du lycée hôtelier La Renaissance ont pris part à cette démonstration. Philippe Mesuron a eu une pensée émue pour ses grands-parents qui lui ont transmis leur savoir-faire. Il est désormais chroniqueur culinaire dans « Ensemble c’est mieux » sur France 3 Nouvelle-Aquitaine.
« Les élèves nous appris des choses sur leur légumes, leurs épices… et nous on leur a amené autre chose avec le foie gras ou bien les coeurs qu’ils n’avaient jamais cuisinés. »

Autre découverte sympa : le concert de Noël des Arpèges de la Beauronne, samedi 21 décembre dans la petite église romane du hameau de Preyssac. L’édifice a été récemment restauré avec sobriété et élégance ; les dix choristes amateures et leur cheffe ont fait salle pleine en dépit du froid (la restauration de l’église n’a pas inclus le chauffage). Elles chantaient juste et avec dynamisme. On était heureux. Parenthèse enchantée en un triste jour de pluie…

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